UN SITE PATRIMONIAL EMBLÉMATIQUE À PARIS

 

LA CARRIÈRE MÉDIÉVALE DES « CAPUCINS »

 

 

 

 

Paris est une capitale au rayonnement culturel incontournable. Son prestige a été acquis grâce à son remarquable patrimoine construit, séculairement envié par le monde entier. Au cours de siècles, la ville s’est entièrement constituée grâce à la richesse de ses entrailles géologiques ainsi qu’au talent et au savoir faire de ses architectes créant, une symbolique de l’art et de la culture.

 

Des exploitations résultaient d’immenses cavités qui engendraient périodiquement des catastrophes d’effondrements. Afin de lutter contre ces dangers et ces drames, des travaux de confortations gigantesques seront réalisés sous Paris. Ainsi naquit la doublure de la ville lumière, la capitale souterraine des ténèbres…

 

Les racines de notre cité ont été formatées durant des millions d’années, grâce à cette manne providentielle fournissant tous les matériaux nécessaires à l’élaboration des édifices, la prodigieuse expansion de notre capitale depuis l’antiquité en est le vibrant témoignage.

 

Un douzième de Paris a été sous miné se trouvant ainsi dépossédé de :

-         son calcaire << grossier>> utilisé comme pierre à bâtir ;

-         son gypse ou <<pierre à plâtre>> qui après cuisson, fournissait un excellent plâtre dont la qualité s’exporta jusqu’aux Amériques ;

-         ses graviers et sables fins dits de Fontainebleau employés pour la verrerie et la fonderie ;

-         ses marnes vertes et ses argiles servant à fabriquer les tuiles, les briques et les poteries ;

-         enfin, sous notre actuelle rue Saint-Gothard voilà deux siècles, on exploitait un important gisement de charbon de terre.

 

En 1259, les Chartreux seront les premiers à consolider leur sous-sol avant de construire leur monastère. Plus tardivement, avec les mêmes soucis de sécurité, une énergie considérable sera dépensée par François MANSART en 1645 sous le Val de Grâce ; en 1653 par les Capucins avec leur noviciat (hôpital Cochin) puis par Claude PERRAULT en 1672 avec l’Observatoire.

 

A partir de 1777, les premiers ingénieurs de l’inspection des carrières, de GUILLAUMOT à JUNCHER réaliseront sous notre capitale, l’œuvre architecturale la plus importante jamais entreprise dans le cadre d’une urbanisation occidentale.

 

Toutes ces carrières se trouvent aujourd’hui pratiquement remblayées. Seuls subsistent en témoignage de ce passé industriel, quelques vides d’anciennes exploitations de pierre à bâtir reliés entre-eux par un vaste réseau de galeries d’inspection.



A toutes les époques, ces lieux seront soumis à contribution : ils serviront de voies de communications lors des émeutes et des guerres ; ils seront le refuge de malfaiteurs et de contrebandiers. Parfois des sociétés secrètes ou religieuses s’y réuniront. Enfin, jusqu’au début du xx siècle, ces cavités seront en partie utilisées par les industriels et les champignonnistes.

L’urbanisation galopante depuis le Moyen Âge a nécessité au fur et à mesure de son extension de prodigieux travaux confortatifs. Un linéaire de  trois cents kilomètres de galeries souterraines émaille la rive gauche épousant principalement la voirie de surface. Ce qui fait dire à de nombreux historiens que le sous-sol de la capitale est un Paris à l’envers. 

Cette ville souterraine arbore une richesse patrimoniale exceptionnelle, c’est le terrain d’investigation par excellence pour les géologues, scientifiques et architectes en quête de leur passé. Pour les historiens ces espaces souterrains constituent la mémoire de la ville. Au cours des siècles, l’homme a représenté divers sujets par des figurations et des inscriptions .Ces graffiti laissés sur la roche des cavités permettaient d’exprimer un message, un témoignage d’actualité, ce processus riche d’enseignements n’a cessé d’être depuis les temps préhistoriques.

Pour beaucoup de parisiens, ce milieu souterrain exerce une véritable fascination.

Ivresse des profondeurs ? Ombres de la ville lumière ? Romans et contes populaires s’appuyant sur de nombreuses et ancestrales légendes peuplèrent les ténèbres de ces carrières de créatures mystérieuses et fantastiques…De là peut-être, naquit le frisson d’évoluer dans ces abîmes devenus rapidement de hauts lieux mythiques.

Enfin, cette frange suburbaine a découvert un univers magique et des plus salutaires.

L’ionisation de la roche, constante en ces lieux, génère une euphorisation permanente, l’air est pur, vivifiant, un bien-être s’installe, la fatigue s’estompe tout en annihilant le temps…

De nombreuses expériences réalisées ces dernières années par des spéléologues professionnels ont démontrés ce phénomène. A Budapest, dans les cavités souterraines de même configuration, les services de santé ont installé des espaces thérapeutiques pour les personnes atteintes de déficience respiratoire……

 


<<1983-2003>> VINGT ANS DE RESTAURATION DANS LE SITE

                           MINẺRAL DES <<CAPUCINS>>

 

L’année 2003 s’est inscrite par un double anniversaire pour la société historique <<SEADACC>>.Celui de ses racines trentenaires, puisque sa constitution eu lieu en mars 1973.Ce sera la première association régie sous la loi de 1901 qui s’investira pour l’étude du patrimoine industriel souterrain en milieu francilien. De 1975 à 1977, ses pionniers consacrèrent leur énergie à la restauration des anciennes carrières de <<pierre à bâtir>> situées sous le Muséum de Paris, dont les origines remontent à l’époque Gallo-Romaine. Ce sera également le vingtième anniversaire de l’ouverture du chantier des carrières médiévales des <<capucins>>le samedi 13 août 1983.Le premier coup de pioche sera donné sous l’hôpital Cochin, ce sera le départ d’une longue épopée de réhabilitation. Depuis cette date, l’action constante de la <<SEADACC>> est axée sur la protection et la mise en valeur des anciennes exploitations. Ces carrières situées à vingt mètres en contrebas du Faubourg Saint Jacques constituent pour notre capitale, un maillon incontournable de son patrimoine industriel. L’esthétique du site, conjugué aux multiples et pittoresques architectures de confortation qui émaillent son espace, constituent une vitrine muséographique incomparable. En vingt ans, l’investissement physique des sociétaires pour cette entreprise totalise plus de vingt mille heures de bénévolat, et ce travail de réhabilitation ne pourra s’achever que dans plusieurs années. Il faut bien constater qu’actuellement, et ceci dans les associations, un effritement des éléments actifs se fait ressentir.

 

 

 

RAISONS POUR LESQUELLES UN LIEU DE MÉMOIRE A ÉTÉ RENDU NÉCESSAIRE

 

En 1977, la mairie de Paris organise dans son «hôtel de ville» une exposition en l’honneur du bicentenaire de la création par Louis XVI de «l’Inspection Générale des Carrières» .Deux cents ans d’activités y sont représentées , les gigantesques travaux confortatifs sous la cité seront disséqués à l’aide de documents d’archives, gravures, plans, photos, illustreront toutes les techniques de mise en œuvre des premiers architectes de notre capitale souterraine qui ont construit cet univers parallèle.L’impact historique et culturel de cette manifestation sera plébiscité par les parisiens, en contrepartie, malheureusement , elle déclenchera une invasion urbaine dans ces sous-sols, au demeurant interdits d’accès …De plus en plus fascinés par leurs explorations, des centaines d’Indiana Jones sont à la recherche du «trésor des templiers» en détruisant les architectures de confortation qui sont censées protéger cette emblématique légende…

 

En 1981, la direction du Ministère de la Culture se penche sur ce phénomène contemporain et attribue une importante subvention à une jeune ethnologue afin d’analyser les motivations de cet engouement pour les tréfonds…Celle-ci fera appel «aux connaissances» de quelques marginaux qui inscriront leurs fantasmes dans une étude sociologique La cité des Cataphiles  Les fictions spectaculaires et commerciales narrées dans cet ouvrage seront un tremplin inespéré pour les médias…Une fois de plus , cette mise en exergue sera un détonateur redoutable .S’en suivra une déferlante de vandales qui transformera ces sites en « cour des miracles»


Aujourd’hui notre patrimoine défiguré est irrémédiablement condamné, car inrestaurable .Depuis plus de vingt ans, les pouvoirs publics qui tolèrent cet état de fait, ferment les yeux sur les interdits de circulation, se rendant inconsciemment complices de cette engeance de prédateurs.

D’autre part, nos actuels urbanistes se transforment en «horde d’Attila» ; partout où ils construisent, les sous-sols trépassent .Les confortations traditionnelles des anciens, qui préservaient les vides et permettaient des contrôles de stabilité des sols, sont révolues. Disparues au profit de la sacro-sainte rentabilité, leurs injections de «coulis » comblant en théorie les vides, sont plus ou moins bien circonscrites, détériorant, au passage, l’environnement, même si celui-ci est classé «Monument Historique».Là encore, le cortège de la destruction opère sans limite et sans aucune déontologie.

 


CRITÈRES SÉLECTIFS DU SITE DES ANCIENNES CARRIÈRES DES CAPUCINS

 

Face à la disparition programmée de notre patrimoine souterrain, la «SEADACC» réagi, et se mobilise afin de protéger, pour les générations futures, un témoignage de l’héritage que nous ont légué les anciens.

 

C’est en 1979 que la Société d’Etudes Historiques «SEADACC» sélectionne les anciennes carrières des «Capucins» comme étant le site le plus représentatif du sous-sol de la capitale. Cette carrière, au passé historique séculaire, présente une multitude d’intérêts .Ses architectures de confortation synthétisent le Paris Souterrain. L’ensemble du site forme une entité culturelle, son pittoresque et son esthétique en font sa richesse.Cette exploitation est située au cœur du faubourg Saint-Jacques, haut lieu des extractions de « Pierre à bâtir» au Moyen Âge. Elle est en très bon état de conservation et géologiquement représentative.

Ce musée témoignera de la fabuleuse contribution des racines de notre cité, source génératrice de son prestigieux essor architectural, et assurera la pérennité à ce patrimoine industriel exceptionnel.

 

En 1990 et 1999, le site sera classé, en partie, par les Monuments Historiques.

Un des critères pratiques de notre choix s’est porté sur l’accès à la carrière. Un escalier de vingt et un mètres de profondeur, créé lors de la défense passive en 1943 nous permet d’accéder rapidement au cœur du site.